Deuxième conférence du cycle « IA et éthique » : les données éducatives au cœur des débats
Entre normes juridiques et valeurs éducatives : un équilibre à trouver
Jean-Baptiste Soufron a ouvert la discussion en rappelant les grandes lignes de l’IA Act, en vigueur depuis mai 2024, qui établit un cadre réglementaire européen pour limiter les dérives liées à l’IA. Il a souligné l’importance de régulations spécifiques au secteur de l’éducation, afin d’assurer une IA respectueuse des droits des mineurs et alignée avec les valeurs pédagogiques.
Brice Gascard a exprimé une préoccupation souvent partagée par les enseignants : la crainte de voir leur rôle réduit à celui d’animateur, ce qui pourrait entamer leur légitimité pédagogique. Cette appréhension peut freiner l’adoption des outils d’IA, parfois perçus comme une menace plutôt qu’un appui. Jean-François Cerisier a insisté sur l’importance de former et accompagner les enseignants, affirmant qu’on ne peut guider les élèves vers plus d’autonomie numérique que si les enseignants maîtrisent eux-mêmes ces outils. De son côté, Denis Desjour a mis en avant le lien fondamental entre IA et éducation aux médias et à l’information (EMI), condition essentielle à un usage raisonné et éthique de ces technologies en classe.
IA en pédagogie : entre promesses et devoirs
Sur le terrain, l’IA commence à s’imposer comme un outil pédagogique, à condition d’en faire un usage réfléchi. Yann Houry a évoqué les bénéfices concrets qu’elle peut offrir aux enseignants, notamment en termes de gain de temps pour la préparation de cours ou la correction. Il a toutefois insisté sur l’importance d’enseigner aux élèves à interagir intelligemment avec ces outils : bien formuler des requêtes, comprendre les réponses, exercer leur esprit critique.
Jean-François Cerisier a souligné la responsabilité des éducateurs, qui doivent offrir aux élèves un cadre de réflexion autour de l’IA. L’objectif est de les amener à faire des choix éclairés, à l’issue d’une réflexion personnelle nourrie de connaissances. Il a également proposé de construire avec les élèves des chartes d’usage de l’IA, pour encourager une approche critique et responsable.
Denis Desjour a, quant à lui, insisté sur la nécessité de poser un cadre collectif sur des aspects tels que la gouvernance des communs numériques ou l’âge minimal d’utilisation de l’IA en contexte scolaire. Il a aussi plaidé pour une protection institutionnelle plus forte, à l’échelle des académies.
Un impératif : former et responsabiliser
Un consensus s’est dégagé tout au long des échanges : la formation des enseignants est un levier central. C’est elle qui conditionne à la fois l’usage pertinent des outils d’IA et la capacité à transmettre aux élèves les bons réflexes. Former à l’IA, c’est former à l’analyse, au recul critique et à la prise de décision éclairée.
Cette conférence a révélé la complexité du défi : intégrer l’IA au service de l’éducation, sans en compromettre l’essence. Cela implique une régulation adaptée, un accompagnement solide des enseignants, et surtout, la construction collective d’un cadre éthique cohérent et partagé.
Lien vers la rediffusion de la conférence